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Texte rédigé dans le cadre d'un cours de la fac. 11 mots. 30min pour écrire une histoire en les y intégrant.
Les mots étaient: abnégation - université - alcool - nuage - dictature - gardien de nuit - somnambule - satyriasis - masque - sonate - pastèque.


Il était tard cette nuit là lorsque Jacques se décida enfin à sortir de chez lui, poussé par ses pulsions insatiables dont il refoulait l'origine depuis des mois. Il n'en était pas à sa première virée nocturne et il lui semblait agir, une fois encore, dans une incontrôlable frénésie. Dans le hall de son immeuble, il croisa, comme il était coutume, le gardien de nuit, affalé sur sa chaise, enivré d'un mélange de bières et de vodka comme les laisser supposer les vapeurs d'alcool qu’émettait son corps gras suintant et ruisselant. Jacques le méprisait. D'ailleurs il méprisait tout le monde. Ce monde qui, depuis sa naissance, l’avait rejeté et trahi. Si le destin avait pour vocation d'arbitrer la vie des hommes, Jacques n'était pas là pour jouer. Mais il prenait sa revanche à présent. Une nuit par semaine, le requiem morbide qu'il orchestrait se répétait, bien qu'à ses oreilles, ses crimes résonnaient plus comme une sonate douce et libératrice dans son esprit malade. Ce qui était évident, c'est qu'il perpétrait un art. Son art. Progressant calmement dans les rues malodorantes de sa cité, Jacques huma l'air nauséabond, la tête plongée dans les nuages gris ornant le ciel pollué par les vapeurs fumeuses que crachaient les usines somnambules devant lesquelles il passait à présent. Il observa le logo dégradé de l'entreprise: une pastèque sous laquelle son sigle s'était effacé dans le temps. Jacques connaissait bien cet endroit. Il lui en fallait fallu de l'abnégation à l'époque où il y travaillait, portant son masque comme un fardeau, se noyant dans cette dictature des clones - bagnards désespérés sans avenir. Mais cette période de sa vie était révolue. Jacques n'était plus le gibier des hommes riches et suffisants. Désormais, il était le chasseur. Celui qui vagabondait dans l'attente d'une proie. Sa satyriasis lui montant à la tête comme sa salive à la bouche, Jacques approcha de l'université du coin devant laquelle les étudiantes ingénues et naïves se réunissaient la nuit pour festoyer, se noyant dans leurs cocktails peu dosés et leurs gloussements insupportables. Jacques attendrait que l'une d'entre elles s'égare du troupeau. Et demain matin encore, on parlerait de lui dans les journaux, sans même pouvoir le nommer, comme il en avait toujours été ainsi.

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